Tentative de définition, éléments de méthode

Proposition d'une définition, d'une méthode, pistes de documentation.

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Bouchard
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dim. mai 27, 2018 7:15 pm

Si vous pensez que ces costumes sont médiévaux, ce petit guide est à lire d'urgence ! [img]images/icones/icon14.gif[/img]
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Qu’est-ce que la reconstitution historique ?

Le débat est ouvert depuis de nombreuses années et il est possible d'en dégager quelques principes . Ils ne sont ni exhaustifs, ni définitifs.

La période qui nous intéresse en matière de reconstitution historique est celle du moyen-âge.
Le Moyen-âge n’est pas une époque monolythique.
En effet, il s’étend entre la chute de l’Empire Romain (500 après JC) et la prise de Constantinople ( 1500 après JC).
Durant ces 1 000 années de nombreux changements et évolutions vont se manifester dans tous les domaines.
Les sources historiques qui nous sont parvenues témoignent de cette évolution.
C’est pourquoi un projet qui se réclame de la reconstitution historique doit prendre en compte ces changements pour les révéler.


La reconstitution historique est donc à une démarche qui vise, à l’aide de sources historiques, à recréer du matériel, des objets, des costumes pour une période et dans un espace géographique donnés tels qu'ils auraient pu être.
Sa finalité (de cette démarche) est donc purement matérielle.

La reconstitution historique peut aussi, par certains aspects, se rapprocher de l’archéologie expérimentale voir en emprunter totalement ou partiellement la méthode.
Il s’agira alors non seulement de reconstituer des objets mais aussi d’en tester l’usage dans un contexte qui soit le plus proche possible de leur utilisation initiale.
Ces expérimentations peuvent prendre place dans de nombreux domaines comme la cuisine, la confection de costumes, d’outillage, d’armes,…etc
Il ainsi possible de valider les hypothèses proposées dans un projet là où des éléments d’informations précis sont insuffisants.
La reconstitution historique devient ainsi un champ expérimental.

La reconstitution historique peut également s’inscrire dans une démarche plus large qui a pour but de faire revivre des comportements ou attitudes. On parle alors d’Histoire Vivante.

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments la reconstitution historique ne doit pas être confondue avec d’autres activités de voisinage historique comme l’évocation ou le médiéval fantastique dont la démarche et les objectifs sont différents et non critiquables en tant que tels.


On peut conclure que la reconstitution historique est une démarche qui utilise des principes de raisonnements et de méthodes scientifiques. Le résultat de cette démarche est un objet qui évoque au plus près celui de l'époque.
Cette évocation matérielle sera valide mais d'une manière générale nous ne saurons jamais si elle vraie !
Au surplus, le temps passant, de nouvelles sources apparaissent et rendent parfois obsolètes ou même incorrects des réalisations antérieures pourtant appuyées sur des éléments fiables.


Eléments de méthode :

Qu’est-ce qu‘une source historique ?

Ce sont les vestiges matériels (pièces archéologiques), les écrits (chroniques), les représentations graphiques (enluminures), les statues et décors de l’époque choisie, la liste n’étant pas exhaustive.
La caractéristique d’une source est d’être datée, répertoriée, analysée ou analysable sur pièce.

Les sources historiques ne doivent pas être confondues avec les documents.
Les livres d’histoires, les travaux de recherches, les articles, constituent des documents.

La démarche de reconstitution historique est soumise à plusieurs limites :

Des limites d’ordre matériel :
- Il n’existe pas de trace matérielle de tous les objets qui pouvaient exister à une période donnée.
- Il peut exister des difficultés techniques à dater précisément des objets (technique de datation)
- La disponibilité des matériaux et matières pour reconstituer un élément précis (les moutons du XIIIeme siècle n’existent plus, donc la laine non plus…) peut faire défaut et oblige à faire des compromis. Pour autant, les compromis doivent être le moins nombreux possible et clairement énoncés.
- Des éléments qui nous parviennent peuvent avoir fait l’objet de restaurations par le passé et donc ne plus refléter fidèlement leur aspect initial.

Des limites d’ordre culturel :
- Un symbolisme omniprésent qui nécessite un savoir technique pour être correctement appréhendé (symbolisme religieux, marqueurs culturels…etc)
- La difficulté à qualifier et classer les choses qui peuvent avoir des noms différents pour un même objet, ou une catégorie d’objets, ou même au contraire un nom identique qui concernera des choses différentes !
- Notre approche moderne d’une époque qui nous est étrangère sur bien des aspects.

Toutes ces limites font partie intrinsèque de la démarche de reconstitution historique et à ce titre doivent être clairement dites et bien comprises dans la réalisation d’un projet de reconstitution.
Néanmoins ces limites ne peuvent être un prétexte pour relativiser la démarche de reconstitution dans son ensemble et par conséquent la priver de ses fondements scientifiques.

Quelques pistes de méthodologie pour se lancer dans l’aventure :
o Faire le choix d’une période (fixer une fourchette de 20 à 30 ans).
o Faire le choix d’une zone géographique
o Faire le choix d’un personnage à reconstituer en précisant son statut social et économique
o Dans le cas d’un projet militaire, faire d’abord la tenue civile et seulement après, la tenue militaire (le statut social du vêtement entre le civil et militaire doit être identique).
o Documenter le projet à l’aide de sources historiques (textes, représentations graphiques,…)
o Analyser les sources pour faire la part autant que possible du symbolique et du réel, croiser des sources différentes à chaque fois que c’est possible.
o Vérifier si un projet similaire a déjà été réalisé. Dans l’affirmative, éviter de le copier (sinon c’est de la reconstitution de projet et pas de la reconstitution historique), mais poursuivre sa démarche pour ensuite vérifier les résultats et les comparer.
o Prendre soin de ne pas collectionner des éléments vus un peu partout pour réaliser un projet, mais traiter et documenter le projet dans son ensemble (typiquement : je trouve un accessoire qui me plaît, puis un autre, puis j'essaye de voir ce que je peux faire avec ces deux trucs, je demande donc l'avis de X et de Y, finalement je fais autre-chose, et au bout du compte le projet n'est pas conforme à une démarche de reconstitution et me déçoit).
o D’une manière générale il est plus simple de se familiariser avec l’activité sur un projet simple (paysan, artisan, clerc). Le coût est limité, le risque d’erreur est plus faible, la base reste commune et réutilisable pour des projets ultérieurs plus ambitieux.

Quelques erreurs communes à éviter :
o Les achats dans les boutiques dites « médiévales ». A de rares exceptions près le matériel vendu ne répond pas aux critères qualitatifs de la reconstitution historique.
o Les patrons de costumes « Burda » ou équivalent.
o Copier des costumes d’après des films/revues/autres reconstituteurs/se fier plus à une jolie photo qu'à une bonne source et une démarche solide.
o Les mélanges d’objets de périodes différentes ou de zones géographiques différentes pour un même costume ou de statuts différents (accessoires nobles sur un paysan et inversement).
o Faire passer ses goûts personnels avant les critères de la reconstitution historique (il faut parfois savoir supporter des vêtements peu pratiques ou esthétiquement surprenants…)
o Faire un costume d’évocation en estimant qu’il sera moins couteux qu’un costume de reconstitution. Le coût des matières et le temps passé sont en effet identiques…pour un costume qui sera finalement historiquement critiquable ou rapidement abandonné ( et donc coûts et temps passé finalement doublés).


Quelques éléments de documentation pour débuter une recherche et se documenter :

 Manger au Moyen-âge - Bruno Laurioux

 Voyager au moyen-âge - Jean Verdon

 La nuit au moyen-âge - Jean Verdon

 Le quotidien au temps des fabliaux - Danièle Alexandre-Bidon et Marie-Thérèse Lorcin

 La guerre au moyen-âge - Philippe Contamine

 Guillaume le Maréchal ou le meilleur chevalier du monde - Georges Duby

 Le dimanche de Bouvines - Georges Duby

 Chevaliers et chevalerie au MA - Jean Flori (et tous ses livres sur la chevalerie)

Pour aller plus loin :

 Shoes and pattens Finds from Medieval Excavations in London (Medieval Finds from Excavations in London) : Francis Grew (Author), Margrethe de Neergaard (Author),

 Knives and Scabbards (Medieval Finds from Excavations in London) by J. Cowgill, M. de Neergaard, and N. Griffiths

 Textiles and Clothing, c.1150-1450 (Medieval Finds from Excavations in London)

 Dress accessories 1150-1450 Geoff Egan, Frances Pritchard

 Du silex à la poudre - 4000 ans d'armement en val de Saône (Louis Bonnamour)

- Les costume au XIIIe siècle - Tina Anderlini - ed Heimdal (sources, patrons, techniques, civil et militaire)


Pour les cavaliers :

 The medieval horse and it’s equipment 1150-1450 (John Clark)


Liens web utiles :

 L’Histoire du costume en France (pdf) : http://www.persee.fr/web/revues/home/pr ... 5_1_446602

 La Bible de Maciejowsky 1250 : http://www.medievaltymes.com/courtyard/ ... _bible.htm

 Statues, gisants, sceaux (album photos) : http://www.flickr.com/photos/roelipilam ... 530183550/

 La bible d’Edouard le confesseur 1230-1240 :
http://www.lib.cam.ac.uk/cgi-bin/Ee.3.59/browse?0

 Archéologie de la saône : http://www.culture.gouv.fr/documentatio ... -saone.htm

 Cahiers de recherches médiévales et humanistes : http://crm.revues.org/index2511.html

 Gisants anglais XII-XIV : http://www.themcs.org/armour/14th%20cen ... armour.htm

 Cadenas et pièces archéologiques :
http://www.larsdatter.com/padlocks.htm

 Art roman, sources XIIeme :
http://www.art-roman.net/

 Psautier Lewis 1225-1250 : http://libwww.library.phila.gov/medieva ... mca1850120

 Liber floridus :
http://liberfloridus.cines.fr/

Quelques Banques d’images et d’ouvrages en ligne :

http://mandragore.bnf.fr/html/accueil.html

http://www.enluminures.culture.fr

http://manuscriptminiatures.com

http://gallica.bnf.fr/

http://www.persee.fr

Ne pas oublier google books

wwww.Abebooks.fr : De bonnes occasions et des livres anciens

http://www.Persee.fr : des tas d'articles en ligne souvent téléchargeables en pdf

Les réseaux sociaux dans tout ça ?

Pinterest est une grosse banque de données d’images. A ce titre elle ne manque pas d’intérêt. Néanmoins il convient de l’aborder avec prudence car l’origine et les dates des images ne sont pas toujours indiquées, voir sont erronées.
Ne jamais utiliser au détriment des autres sources et bien s'assurer de l'authenticité de images au moindre doute.

FACEBOOK :
De nombreux échanges ont lieu sur ce support. Néanmoins le principe de fonctionnement par flux nuit à la pérennité des informations.
Là encore, ce support est séduisant mais comme Pinterest, est à manier avec prudence sans que ce soit au détriment des autres sources de documentation, ni des sources historiques. La validité d'une source n'a rien à voir avec le nombre de likes qu'elle recueille...

Voilà, il ne reste plus qu'à s'y mettre en gardant à l'esprit que la reconstitution n'est pas une finalité mais une démarche qui tend à reproduire un objet, cette reproduction n'étant par nature jamais parfaitement identique à l'original.
Membre des GMA - Membre de Bouvines 1214 - http://www.guerriersma.com - Ne pas subir-
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