Fourrure et utilisations

Sources, techniques, matières...

Modérateur : L'équipe des gentils modos

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vuillem
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mar. mai 27, 2008 3:15 pm

medieviste a dit :

Euh, non, désolé, ce n'est aucunement une PREUVE qu'il existe une chaîne de production de chapeaux en fourrure !
On se contente de constater qu'il existe plusieurs modèles de couvre-chefs en fourrure, mais de là à affirmer que c'est une preuve d'une chaine de production, il y a un gouffre ! C'est pas parce qu'on a quelques enluminures montrant ce type de couvre-chef qu'on peut immédiatement en déduire l'existence d'une chaîne de prod' !

Sur quoi serait basée cette preuve ? Il y a une chaine de production de deniers tournois, angevins, parisis, là on a des comptes, des ateliers de frappe monétaire un peu partout, et une production en masse.

Contentons-nous de constater que ces couvre-chefs existent dans une certaine proportion (laquelle ? Quel est le pourcentage de fourrure sur les couvre-chefs d'après statues et enluminures... ???)
Euh... ils tombent du ciel les chapeaux ? Une production, ça ne veut pas dire une industrie. Je pense que c'est un problème de vocabulaire. Une chaîne opératoire, c'est simplement l'ensemble des gestes d'une technique permettant de produire/fabriqué un objet. On parle de chaîne op pour la production de silex au paléo, c'est de la que vient le concept.
Le monde est déjà saturé de passé, à tel point que le présent peut à peine y trouver ça place (L. Olivier/Le sombre abîme du temps)
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vuillem
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mar. mai 27, 2008 3:21 pm

Corwinna fram Gyruum a dit : Eh bien, si quelqu'un, ton père, par exemple, te l'apprend ?
Ce n'est pas parce que maintenant tu ne connais pas la technique que ton arrière etc grand père l'ignorait...
Personnellement, je suis pas fichue de faire un meuble... Mon arrière grand-père savait. Mais bon, il a appris à son fils, pas à ma grand mère.
Il y a des trucs qui s'apprenaient depuis la plus tendre enfance. Et un tannage rudimentaire, à partir du lapin qu'on venait de manger, pourquoi pas ? Même si ça ne doit tenir qu'un hiver...

Tout à fait, justement pourquoi pas. Et pour sortir du pourquoi pas, il faut des documents, ce que j'essaye d'expliquer depuis le début de cette discussion. Ysengrijn a tout à fait raison de soulever ce dont on dispose.
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le furet
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mar. mai 27, 2008 4:23 pm

Toute la question est là : dispo et diffusion des savoirs technologiques.

Dites, on n'est pas obligé de passer par le tannage pour utiliser une peau, on peut aussi se contenter de faire sécher, saler et assouplir une peau, surtout si c'est pour en faire une doublure.

Ce qui est étonnant, c'est qu'autant on imagine la squaw des plaines écharner et assouplir sans peine des peaux, autant pour une ménagére médiévale on ne se l'imagine pas du tout. Etrange!

Pour le ramassage des peaux de lapins, on les suspendait pour les sécher en attendant le ramasseur qui lui, revend aux tanneries. Mais en fait, le probléme reste entier. Au XVéme on sait travailler le bois, on sait huiler de la toile, et la coller. Donc, un planeur c'est histo ! Ben non justement !

Ceci dit, faut pas non plus tomber dans l'excés inverse. Y'avait des idiots et pas moins qu'aujourd'hui, mais il y avait aussi des gars débrouillards et instruits.

Bref, concernant les peaux de lapin, on n'est pas sur du tannage, mais sur des techniques d'utilisation de peaux crues assouplies.
Pour le tannage domestique, rien trouvé du tout jusqu'à présent mais p't-être que l'info dort quelquepart.


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Grég le furet


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yrwanel
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mar. mai 27, 2008 6:18 pm

vuillem a dit :


Tout à fait, justement pourquoi pas. Et pour sortir du pourquoi pas, il faut des documents, ce que j'essaye d'expliquer depuis le début de cette discussion. Ysengrijn a tout à fait raison de soulever ce dont on dispose.
Je te dirais que c'est là qu'est l'os!
Autrefois, "l'école", c'était tout simplement la vie, au quotidien, et sans manuels ou bouquins obligatoires, loin s'en faut, genre "la cuisine pour les nuls", "le tissage pour débutant", "allumer son feu sans se brûler", etc... (je sais: je me fous de la gueule de notre civilisation actuelle!).
Idem, et "phénomène actuel": peu importe ce que tu as appris par toi-même, par transmission de savoirs (parents, famille, voisin, autres): tu n'es "rien" face au monde du travail si tu n'es pas passé par la case "école" (=> bouquins, syllabus, etc.).

Si on prend les guildes, avec cursus d'apprentissage très spécialisé: on sait qu'il y avait apprentissage, on a pas de "bouquins de cours", encore moins les "recettes et méthodes", transmises par l'exemple et l'expérience, soit gestes et oralement.

Je ne pense pas que chaque personne, à chaque génération, fût obligée, seule dans son coin de chaque fois devoir "ré-inventé" l'eau tiède, auquel cas on en serait encore au stade clactonien de l'évolution "technologique".
Les savoirs du "quotidien" se transmettaient entre les personnes (quitte à ce que les plus doués se spécialisent en échange de services des autres "spécialistes" en d'autres domaines) et se transmettaient de génération en génération, que ce soit dans la sphère "familiale" ou par le voisin, ou...
Ces "savoirs de bases" (voir Maslow), niveau évolution de l'enfant vers l'adulte passe par la phase des "jeux symboliques" où l'enfant, par jeu, imite les activités des adultes. Il joue à l'arc...et est ravi si, d'aventure, il réussi à avoir un lièvre => il tentera de réitérer son exploit => etc.
Idem pour le reste (planter des graines, garder des animaux, aider à balayer ou faire la lessive, filer, aller chercher des plantes ou fruits...).

Petits, mes moutards ont participé à mes activités (quitte à aménager les activités en fonction de leurs possibilités vu leur âge), que ce soit: dessin, peinture, tissage, pâtisserie, planter des clous, jardiner, récolter des aromatiques en nature, etc.
On est dans une civilisation urbaine et mécanisée => effectivement, ces savoir-faire peuvent ne pas être "indispensables". N'empêche: un devient ébéniste, l'autre jardinier paysagiste (et va faire herboriste). Ces "spécialisations-là": effectivement le relais a été pris par une école. Au MA, cela aurait été une guilde ou une personne à "savoir-faire spécialisé" en apprentissage.

Ce que je sais en récolte d'aromatiques et médicinales, c'est le fameux berger qui me l'a appris...
Là aussi: pas de bouquins, pas de "traces" matérielles... MAIS transmission d'un savoir et d'un "savoir utiliser".
Il m'a aussi appris à tailler mes "navettes" à macramé, du reste. ;-)
pour situer: il me voyait "ramer" avec mes longueurs de fils (j'avais 10 ans): il a réfléchi et a goupillé une "navette" sur base des clavettes à collier. Il m'a montré comment faire sans m'entailler les doigts.

Le grand-père de Perline, dans les campagnes, polyvalent, est très loin d'être un "cas unique". [img]images/icones/icon15.gif[/img]
Et LA, se rencontre l'analyse du fonctionnement humain dans l'ensemble de son contexte (holistique) ET l'analyse de l'activité et ses requis (holistique).
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kalima
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jeu. mai 29, 2008 8:32 am

Extraits du livre "Histoire des anciennes corporations d'arts et de métiers" (par Ch Ouin-Lacroix, 1850) :

"Les pelletiers-fourreurs obtinrent des statuts de Henri Ier [NB : le duc-roi Henri 1er Beauclerc], en 1160, et des privilèges de la part des maires de Rouen et des magistrats anglais, à l'époque de leur domination à Rouen. Gauvin de Manviel, lieutenant au Bailliage, révisa leurs règlements en 1462, confirmés par Louis XI en 1470, augmentés encore en 1474 par Jean de Montespédon."

"On admirait à la halle des pelletiers-fourreurs ces magnifiques
peaux de castor et de martre qui, selon l'expression d'Adam de Brème, écrivain du moyen-âge, excitaient un tel plaisir qu'on en devenait presqu'amoureux. Nous soupirons
après les robes de martre, disait un auteur du même temps, comme après le souverain bonheur. La fourrure appelée vair, dont on garnissait les manteaux et le bonnet
des chevaliers, n'était pas moins estimée. Les prêtres eux-mêmes en décoraient leurs vêtements : capa choralis pellibus variis furrata.
Les pelletiers employaient aussi, pour des usages plus communs, beaucoup de peaux de lièvre et de lapin."

NB : ce livre traite avant tout de données normandes, voire rouennaises

A noter : Rouen compte carrément une église Ste-Croix-des-Pelletiers, qui existe toujours et se trouve... rue des Pelletiers.
Joieuse Aguille
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kalima
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lun. oct. 27, 2008 10:43 am

Dans une biblio importantes sur les vêtements au moyen-age (http://questes.free.fr/pdf/biblio/biblio-vetement2.pdf), plusieurs références d'ouvrages sur les fourrures :

POUCHELLE Marie-Christine, « Des peaux de bêtes et des fourrures. Histoire médiévale
d’une fascination », dans Le temps de la réflexion, 1981

LACHAUD Frédérique, « Les livrées de textiles et de fourrures à la fin du Moyen-Age :
l’exemple de la cour du roi Edouard 1er Plantagenêt (1272-1307) », dans Le vêtement,
histoire, archéologie et symbolique vestimentaire au Moyen-Age, Le léopard d’Or, Paris, 1989

DELORT Robert, Le commerce des fourrures en Occident à la fin du Moyen-Age, (v. 1300 -
v. 1450), Paris, Bibliothèque des écoles françaises d’Athènes et de Rome, 1978

CONDUCHE Dominique, Les fournitures d’étoffes et de fourrures à la cour de Philippe le Bon, duc de Bourgogne (1419-1467), surtout d’après les comptes de la recette générale des finances, mémoire de maîtrise Histoire, Lille
Joieuse Aguille
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kalima
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lun. sept. 06, 2010 10:57 am

Je ré-active un vieux sujet sur l'utilisation des fourrures au moyen-âge, ça peut servir avec l'hiver qui arrive pour éviter l'affreux cépahisto :crazy:

un article intéressant pour les bourguignons et autres braves gens de l'Est, même si il n'y a que quelques éléments médiévaux :
Gascon Richard. La foire des Sauvagines de Chalon-sur-Saône. In: Les Études rhodaniennes. Vol. 12 n°1, 1936. pp. 25-39.
doi : 10.3406/geoca.1936.6481
url : http://www.persee.fr/web/revues/home/pr ... _12_1_6481

Hors période (gaulois) mais très intéressant pour la fréquence d'usage de la peau de chien :
Debord Jean. Les artisans gaulois de Villeneuve-Saint-Germain (Aisne). Structures, production, occupation du sol. In: Revue archéologique de Picardie. N°3-4 1993. pp. 71-110.
doi : 10.3406/pica.1993.1667
url : http://www.persee.fr/web/revues/home/pr ... m_3_1_1667
voir le chapitre sur la pelleterie p 90, avec des restes de chien qui représentent... 95% des restes de carnivores !
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kalima
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lun. sept. 06, 2010 11:08 am

Fourrure de lynx :
"Sur les marchés occidentaux on trouva d'abord les peaux des lynx autochtones et du lynx de Dalmatie, ensuite seulement celles des lynx gris du Nord, beaucoup plus coûteuses. Les lynx gris, chassés par les grands seigneurs russes, sont gardés comme trophées, ou pour leur garde-robes, ou encore pour leur trésor... « Ainsi les peaux fournies au marché occidental sont-elles presque toujours les produits d'une chasse fruste, menée par des non-nobles, paysans, trappeurs ou peuples primitifs qui les obtiennent une à une avec des moyens restreints »
C'est seulement à la fin du Moyen Âge que les peaux du lynx du Nord et de l'Est parviennent sur les marchés occidentaux, fourrure de grande valeur et de grand prix. Les lois somptuaires anglaises les réservent aux ducs, comtes et barons37. S'il est donc difficile de préciser quantitativement l'usage du lynx en pelleterie au Moyen Âge, il est certain qu'il est employé comme fourrure.
"

"Le Moyen Âge semble avoir distingué, en pelleterie, les petits lynx rouges d'Europe occidentale, appelés ici luserue, là luberne, lucerne, ou lucrote21, des grands lynx gris venus du nord et de l'est du continent, apparus très tard sur le marché, seulement entre le XVe et le XVIe siècle, et vendus bien plus cher, sous l'appellation de loss, ou loess, luhs, lixinae pelles"

2 extraits de
Halna-Klein Elisabeth. Sur les traces du lynx. In: Médiévales, N°28, 1995. Le choix de la solitude. pp. 119-128.
doi : 10.3406/medi.1995.1328
url : http://www.persee.fr/web/revues/home/pr ... 14_28_1328
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kalima
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mar. sept. 07, 2010 11:30 am

Dans un livre sur google "Barcelone et le grand commerce d'Orient au moyen-âge"
http://books.google.fr/books?id=m-hlLDt ... &q&f=false
il y a tout un chapitre sur les fourrures, leur valeur relative, ... à partir de la page 402.
Il est par exemple expliqué que le vair est une fourrure de luxe alors que l'agneline, malgré sa finesse et sa qualité, était moins couteuse et pouvait toucher une clientèle nettement plus large.

chapitre sur les fourrures tout à fait intéressant à partir du bas de la page 1158 :
Geremek Bronislaw. Le commerce de Novgorod avec l'Occident au Moyen Âge. In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 19e année, N. 6, 1964. pp. 1157-1170.
doi : 10.3406/ahess.1964.421271
url : http://www.persee.fr/web/revues/home/pr ... 9_6_421271
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