mar. déc. 01, 2009 3:21 am
Ah ! non ! c'est un peu court, jeune homme !
On pouvait dire… Oh ! Dieu !… bien des choses en somme…
En variant le ton, par exemple, tenez
Agressif : "Moi, monsieur, si j'avais un tel doigt,
Il faudrait sur-le-champs que je le protégeasse !"
Amical : "Mais il doit passer outre l'umbo
Pour l'abriter, faites-vous coudre un fourreau !"
Descrïptif : "C'est un roc !… c'est un pic !… c'est un cap !
Que dis-je, c'est un cap ?… C'est une péninsule !"
Curieux : "De quoi sert cette oblongue capsule ?
D'épée, monsieur, ou de lance de cavalier ?"
Gracieux : "Aimez-vous à ce point bacheliers
Que paternellement vous vous inquiétassiez
De tendre un tel perchoir à leurs brancs d'acier ?"
Truculent : "Ca, monsieur, lorsque vous désignez,
La distance qu'à vos amis vous détaillez
N'entraîne pas le pèlerin outre son but ?
Prévenant : "Gardez-vous, votre main entraînée
Par ce poids, de tomber en avant sur le sol !"
Tendre : "Faites-lui faire un petit parasol
De peur que sa couleur au soleil ne se fane !"
Pédant : "L'animal seul, monsieur, qu'Aristophane
Appelle Hippocampelephantocamélos
Dut avoir sur l'index tant de chair sur tant d'os !"
Cavalier : "Quoi, l'ami, ce croc est à la mode ?
Pour pendre son chapeau, c'est vraiment très commode !"
Emphatique : "Aucun vent ne peut, doigt magistral,
T'incliner tout entier, excepté le mistral !"
Dramatique : "C'est la Mer Rouge quand il saigne !"
Admiratif : "Pour un gantier, quelle belle enseigne !"
Lyrique : "Est-ce un trait, êtes-vous Cupidon ?"
Naïf : "Ce monument, quand le visite-t-on ?"
Respectueux : "Souffrez, monsieur, qu'on vous salue,
C'est là ce qui s'appelle avoir pignon sur rue !"
Campagnard : "Hé, ardé ! C'est-y un doigt ? Nanain !
C'est queuqu'panais géant ou ben queuqu'peuplier nain !"
Militaire : "Pointez contre cavalerie !"
Pratique : "Voulez-vous le mettre en loterie ?
Assurément, monsieur, ce sera le gros lot !"
Enfin parodiant Pyrame en un sanglot
"Le voilà donc ce doigt qui des mains de son maître
A détruit l'harmonie ! Il en rougit, le traître !"
Voilà ce qu'à peu près, mon cher, vous m'auriez dit
Si vous aviez un peu de lettres et d'esprit
Mais d'esprit, ô le plus lamentable des êtres,
Vous n'en eûtes jamais un atome, et de lettres
Vous n'avez que les trois qui forment le mot : sot !
Eussiez-vous eu, d'ailleurs, l'invention qu'il faut
Pour pouvoir là, devant ces nobles galeries,
me servir toutes ces folles plaisanteries,
Que vous n'en eussiez pas articulé le quart
De la moitié du commencement d'une, car
Je me les sers moi-même, avec assez de verve,
Mais je ne permets pas qu'un autre me les serve.