L'effectif français lors du siège d'Orléans

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mar. févr. 20, 2007 9:39 pm

D'après "L'art militaire et les armées au moyen age tome 2 de Ferdinand LOT Edition Payot 1946"


"Les effectifs Français


Le récit dit « journal du siège d’Orléans et du voyage de Reims » ou, selon la première édition, « Petit traicté parmanière cronique, contenant en brief le siège mis par les Angolys devant la cité d’Orléans et les saillyes, assaulx et escarmouches qui durant le siège furent faictes de jour en jour, la venue et vaillants faictz de Jehanne la Pucelle et comment elle en feist partir les Angloys et en lever le siège par la grâce divine et force d’armes » a joui dès qu’il a été connu d’une grande réputation et à bon droit. Sans doute, tel qu’il nous est parvenu, ce texte ne saurait être antérieur aux alentours de l’année 1466. Mais il est incontestable qu’il représente un journal, tenu au fur et à mesure des événements, interpolé plus tard avec des passages empruntés aux parties des chroniques du Héraut Berry et de Jean Chartier concernant la mission de Jeanne d’Arc.


Un précieux moyen de contrôle nous est offert par le « Compte de Me Hémon Raguier, trésorier des guerres du Roy nostre sire, depuis le 1er mars 1424 jusques au dernier septembre 1433, rendu par Charles Raguier son fils, et Louis Raguier, conseiller en la cour de Parlement, aussi son fils en l’an 1441. »


L’original a disparu, mais il en subsiste deux copies. L’une a été faite au XVIIIe siècle par Polluche, érudit orléannais, d’après un manuscrit d’Hubert, chantre de Saint-Aignan d’Orléans (mort en 1694), qui avait rassemblé des matériaux pour écrire une histoire d’Orléans et de l’Orléannais qu’il n’exécuta pas. Il est plus que probable qu’il tenait le manuscrit de l’obligeance de Vyon d’Hérouval (mort en 1689) lequel communiquait obligeamment à ses amis les pièces qu’il avait collectionnées. Vyon d’Hérouval étant auditeur à la Chambre des comptes, a dû prendre l’original dans les archives de cette compagnie et, par suite, le sauver de l’incendie de 1737. Comme une partie des documents rassemblés par Hubert en 8 registres, a passé entre les mains d’un amateur orléannais « qui les garde avec un soin jaloux », il se pourrait que l’original subsistât encore dans le cabinet d’un collectionneur.


La copie de Polluche n’est pas excellente. Son auteur a retranché des détails jugé par lui fastidieux et il a mal lu quelques chiffres. Heureusement qu’une autre copie, plus complète (sauf qu’elle a sauté le chapitre 3),se trouve a la bibliothèque nationale (suppl. français7858, aujourd’hui ms.fr.2342). C’est à l’aide de ces 2 mss, que Jules Loiseleur a donné, en 1868, son édition du compte d’Hémon Raguier, précédé d’une excellente introduction sur « l’administration des finances, le recrutement et le pied de solde des troupes à cette époque »


Dès septembre 1428 il fut évident que les Anglais allait chercher à s’emparer d’Orléans. Une garnison fut envoyée pour renforcer la milice urbaine, absolument incapable de défendre la place, malgré toute sa bonne volonté. Le 30 septembre 1428 une somme de 1999 écus d’or et 3024 livres, 15 sous tournois fut distribuée à Chinon et à Orléans, du commandement de Raoul sire de Gaucourt, gouverneur d’Orléans, à « trente-un capitaines et chiefs de guerre ». Elle fut répartie entre 471 hommes d’armes et 612 archers. Mais une partie seulement de ce total concerne Orléans. On paye aussi les garnisons de Châteaudun, sully sur Loire, de Baugency, et également une petite armée d’Ecossais, composée de 169 hommes d’armes et de 400 archers, sous les ordres de sept capitaines « du pays d’Escosse ». La part attestée sûrement pour Orléans est seulement de 169 hommes d’armes et de 74 archers, au total 264 combattants, touchant 644 écus 949 L., 15 s.t. Les capitaines cité par le « journal » dans son récit des premières semaines du siège, qui commence le 12 octobre, sont Raymon de Villars, le sire de Guitry (qui n’est autre que Guillaume de Chaumont), sire de Quittry, le sire de Couras (c'est-à-dire le Béarnais Coaraze), le sire de Saincte-Traille (Xaintraille), Poton, son frère, Mathias l’Argonais (identique Marcias d’Arhac), Pierre de la Chapelle, enfin le gouverneur d’Orléans, le sire de Gaucourt. Ces noms se retrouvent dans le compte pour le 30 septembre, sauf le sire de Gaucourt, avec, en plus, Girault de la Paillère, La Hire et Bernard de Comminges sont absents, mais leurs hommes sont à Orléans. Poton verse leur solde à ceux de La Hire et de Bernard de Comminges. L’ensemble des soudoyers touche 649 écus, c'est-à-dire 1292 l.


Le 24 octobre la bastille des Tournelles sur la rive gauche de la Loire, fut emporté par les Anglais, mais le comte de Salisbury y fut mortellement blessé. Le siège n’en continua pas moins.


Le lendemain, des renforts parviennent à entrer à Orléans. Ils sont commandé par Jean, dit le bâtard d’Orléans (Dunois), Sainte-Sévère, maréchal de France, Jean de Bueil, Jacques de Chabannes, maréchal de Bourbon, le sire de Chaumont-sur-Loire (Guillaume de Guitry), Théaulde de Valpergue, capitaine lombard, Estienne de Vignolles, dit La Hire, un Agonais du nom de Sernay ou Cernay, capitaine de Vendôme. Ces forces se montaient à 800 combattants selon le « journal du siège », chiffre certainement trop fort. Les quittances délivrées par cinq de ces capitaines ( le Bâtard, Sainte-Sévère, de Bueil, Jacques de Chabannes, Estienne de Vignolles dit La Hire) le 30 octobre accusent seulement 219 hommes d’armes et 183 hommes de trait, ayant touché 2297 l.t. Il est vrai qu’il faut y ajouter les contingents de mercenaires étrangers, Théaulde de Valpergue, lombard, et Sernay ou Cernay, aragonais, lesquels ne se trouvent pas spécifiés dans le compte à la même date. Mais ce qu’on sait des forces de leurs compagnies par la suite n’est pas de nature à nous faire croire qu’ils comblaient la différence entre les 402 du compte etles 800 du « journal ». En effet, en mars de l’année suivante, Théaulde dispose à un moment de 33 hommes d’armes et 41 hommes de trait, et à l’autre de 30 haumes d’armes et 49 de trait. Sernay ou Cernay a 11 hommes d’armes et 12 de trait, puis 11 hommes d’armes et 9 de trait. Leurs contingents ont donc grossi d’une centaine d’hommes seulement celui des cinq capitaines français entrés à Orléans le 25 octobre. C’est donc à environ 500 combattants qu’il est prudent d’évaluer le chiffre des renforts entrés en ville à cette dernière date."
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mar. févr. 20, 2007 10:09 pm

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"Dans le compte de novembre, au lieu de spécifier les nombres de soudoyers par catégorie (hommes d’armes, hommes de trait), comme il fait ailleurs, Raguier donne pour chaque compagnie, le nombre des « payes ». Si on totalise, on arrive à 632 payes. L’homme de trait touchant la moitié de la solde de l’homme d’arme, le total des soudoyers est nécessairement supérieur à celui des « payes ». Il n’est pas impossible d’avoir une idée approchée de l’une et l’autre catégorie. Dans les comptes des mois suivants on observe que les archers ne constituent guère plus des 2/5 du total des soudoyers. Si nous reportons cette proportion en novembre nous aurons environ 455 hommes d’armes et 300 archers, soit au total 755 combattants. Nous sommes vraiment bien près du chiffre de 800 hommes donné par le « journal ». Mais ce dernier chiffre est celui des renforts. Au contraire, les 632 payes, s’appliquant par hypothèse à 755 hommes, s’entendent de la garnison totale, en y comprenant l’effectif de la garnison antérieure à l’entrée des renforts du 25 octobre. Or cette garnison s’élevait, on vient de le voir, à environ 400 hommes. Ce dernier chiffre doit être diminué de celui des pertes éprouvées par les assiégés, notamment lors de la défense de la bastille des Tournelles. Mais ces pertes ne paraissent pas avoir été considérables : le 24 octobre, la bastille, démolie par l’artillerie ennemie et intenable, avait été évacuée sans combat. Le 21, lors d’un assaut furieux, les Anglais avaient eu 240 tués, plus que les Français, dont les pertes peuvent donc être évaluées à environ 200 morts.


La garnison d’Orléans pouvait donc être réduite à environ 200 hommes le soir du 24 octobre. Et si, avec les renforts arrivés le 25 octobre, elle ne se montait pas, selon toute vraisemblance, à plus de 755 hommes, le chiffre de 800 pour ces renforts donné par le « journal » est trop fort. Ces renforts n’ont pas dû excéder 500 hommes.


En décembre, le nombre de payes signalées par le compte de Raguier se monte à 685. L’augmentation provient, semble-t-il, de l’entrée à Orléans, non signalée par le « journal », d’un capitaine écossais, David Malleville, qui apparaît pour la première fois dans le compte, où il est porté pour 60 payes.


Le « journal » signale l’entrée à Orléans, le 5 janvier 1429, de Louis de Culan, amiral de France, avec 200 combattants ; le 6, une sortie contre les Anglais du même Culan, avec le maréchal Sainte-Sévère et Théaulde de Valpergue ; le 15, une autre sortie menée par le bâtard d’Orléans, Sainte-Sévère, Jacques de Chabannes ; le 24, l’entrée de La Hire avec 30 hommes ; le 29, l’entrée du seigneur de Villard (Raimon), du seigneur de Sainctes-Trailles (Xaintrailles) et de Poton son frère, de messire Cernay (ou Sernay) « venant de parler au roy ». Ces personnages rentrent en réalité dans Orléans.


Le 30 octobre, le bâtard s’échappe de nuit pour aller à Blois conférer avec le comte de Clermont, fils aîné du duc de Bourbon.


Le 30 nouvelle sortie menée par le maréchal Sainte-Sévère, La Hire, Poton, Jacques de Chabannes, Denis de Chailly, Cernay l’Aragonnais.


Tous ces noms se retrouvent, avec d’autre, dans le compte de Raguier pour le mois de janvier 1428 (1429 N.S.). En suite de lettres-patentes du roi Charles VII données à Mehun sur Yèvre, le 17 décembre 1428, il a versé en janvier suivant la somme de 5130 l.t à 22 capitaines dont les effectifs si nous les totalisons, se montent à 436 hommes d’armes et à 319 archers, en tout 755 combattants. Ajoutons le contingent, non spécifié, et peu considérable de Bouzon de Fages, et nous arrivons à 800 hommes tout au plus.


Cette garnison va être renforcée. Dès la fin du moi, le roi dépêche sur Orléans un capitaine écossais, patrice d’Ogilby, vicomte d’Angers (26 janvier), et Jehan Stewart, seigneur de Derulle (Darnley), connétable de l’armée d’Ecosse. L’effectif n’est pas indiqué. Et pas d’avantage celui d’Hector de la Jaille, chambellan du roi, engagé le même jour. Une grosse somme (3750 l.t) est donnée le 4 février, à Chinon, à 4 capitaines pour lever des troupes qui devront se porter au secours d’Orléans. Le 11 février on paye à un célèbre canonnier, Jean de Montesclerc, une jolie somme (140 écus d’or) : engagé à Angers, en octobre précédent, il est envoyé à Orléans « pour sevir de son fait, industrie et mestier ».


Ces mesures sont suivies d’effets. Le 5 février, entrent de nuit dans la ville 30 combattants venant de Sologne. Le 8, ce sont des Ecossais, sous Guillaume Stewart, frère du connétable, puis le sire de Gaucourt, le sire de Verduzan (Jean Lescot). Le tout ferait 1000 combattants « bien habillez pour le faict de guerre », selon le « journal ». La même nuit, pénètrent 200 hommes de Guillaume Le Bret et 120 de La Hire.


Le 9 février, s’échappent d’Orléans, Jacques de Chabannes, Regnault de Fontaines, le Bourg (Bâtard) de Bar, ce dernier sera capturé en route. C’est qu’il s’agit de conférer à Blois avec le comte de Clermont pour une importante entreprise, couper un corps expéditionnaire, venant de Paris, ravitailler l’armée Anglaise. Les forces du comte de Clermont sont évidemment insuffisantes à elle seules pour cette opération, ou plutôt il n’a pas d’armée. Aussi le 10 février, le Bâtard, avec 200 combattants, rejoint Clermont à Blois, puis c’est le tour de Jean Stewart, connétable d’Ecosse, du sire de La Tour, baron d’Auvergne, du vicomte de Thouars, du sire d’Amboise et autres. Le « journal » évalue à 4000 le nombre de ces combattants qu’il dit tirer d’Auvergne, de Bourbonnais, d’Ecosse.


Ce n’est pas tout. Le lendemain, 11 février, sortent d’Orléans, pour rejoindre Clermont, Guillaume d’Albret, Guillaume Stewart, frère du connétable dEcosse, Sainte-Sévère, Graville, Saincte-Traille (Xaintrailles), Poton, son frère, La Hire, Verduzan : le tout forme, d’après le « journal » 1500 combattants.


Le comte de Clermont, qui c’est avancé jusqu’à Rouvray, disposerait donc de 3 à 4000 combattants, toujours selon le « journal ». Si la jonction avait pu être opérée entre cette dernière armée et celle du comte de Clermont, le corps expéditionnaire protégeant les 300 chariots venant de Paris, sous le commandement de Fastot (Falstoff), du bailli d’Evreux, de Simon Morhier, prévôt de Paris, ne comprenant que 1500 Anglais et « faulx François », Parisiens, Picards, Normands, eut dû être surpris et défait. Il n’en fut rien. La journée de Rouvray, dites « Destrousse des Harengs » par dérision, fut un désastre pour les français (12février).


Cette défaite stupide, qui coûta aux Français 3 à 400 tués, eut une influence désastreuse sur le moral des capitaines français. Ils crurent certainement impossible de continuer la résistance à Orléans et ne songèrent qu’à se mettre en sureté, eux et leurs compagnies. Dès le 18 février Clermont partit, sous prétexte de rejoindre le roi à Chinon, et entraîna avec lui La Tour d’Auvergne, l’amiral Louis de Culan, le chancelier Regnault de Chartres, archevêque de Reims, l’évêque d’Orléans, La Hire et des chevaliers et écuyers d’Auvergne, de Bourbonnais, d’Ecosse dont le « journal » évalue le nombre à 2000, « dont ceulx d’Orléans, les voyans partir ne furent pas bien contans ». Il ne resta dans la ville que le Bâtard et Sainte-Sévère : encore ce dernier devait-il partir peu après (le 16 mars) pour recueillir l’héritage de son beau-frère Châteaubrun, tué à la bataille de Rouvray.


Désespérés, les Orléanais, qui jusqu’à lors avaient fait preuve d’un beau moral, députèrent Poton de Xaintrailles au duc de Bourgogne pour qu’il usât de son crédit auprès des Anglais et obtint une trêve et la levée du siège.


Cependant Orléans conservait une garnison plus appréciable que ne le ferait croire le « journal ». Le compte du trésorier des guerres Hémon Raguier signale deux distributions d’argent, l’une « dès le mois de mars 1428 avant Pasques », donc entre le 1er et le 27 mars, jour de Pâques de ce qui est pour nous 1429, l’autre « dès la fin du mois de mars 1428 », donc entre le 27 et le31 mars. La première qui a le caractère d’une gratification ou plutôt d’un acompte, puisqu’elle n’atteint que le chiffre de 1880 écus et 234 l. 25 s.t. distribuer à 21 capitaines, à deux messagers ayant amené l’argent de Blois à Orléans, au célèbre canonnier, Jean de Montesclerc. Le total des soudoyers est de 562 hommes d’armes et de 418 gens de trait. Il est donc au moins égal à celui de novembre et décembre 1428.


Le second versement est une solde véritable. Il se monte à 6264 l., 10 s.t. il est distribué à 19 capitaines commandants 508 hommes d’armes et 395 gens de trait. Il y a donc une légère diminution d’effectifs par rapport au premier acompte, de peu antérieur cependant."
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mer. févr. 21, 2007 10:58 pm

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"En avril, des renforts arrivent. Le 24, c’est Bourc (Bâtard) de Mascaran avec 40 combattants ; le 26, Alain de Giron avec 100 ; le 27, un petit corps de 60 venue de Beaune (la-Rollande) en Beauce. Le 28, un capitaine renommé, Florent d’Illiers, frère de La Hire, entre avec 400 combattants venant de Chateaudun. Le 29, c’est un corps de 50 gens de pied venus du Gatinais.


Le tout monterait donc à 1572 à la fin d’avril, si l’on additionne les chiffres du compte de Raguier et ceux du « journal ».


Le 29, à huit heures du soir, entre Jeanne d’Arc, à la tête de 200 lances.


C’est avec ces faibles forces que le 4 mai, l’après-midi, la Pucelle, sans attendre le gros de l’armée royale, qui est retourné passer la Loire à Blois sort au matin avec 500 hommes, puis, l’après-midi, va assaillir la bastille Saint-Loup, à la tête de 1500 combattants, cependant qu’un corps de 600 hommes, sous Sainte-Sévère, Graville, Coulonce et autres rejetait la garnison anglaise de la bastille Saint-Pouair, qui tentait de se porter au secours de la bastille de Saint-Loup. Ces chiffres de 1500, plus 600 (2100), avancés par le « journal », donnent pour les forces tenant Orléans à ce jour un effectif un peu plus considérable que celui qu’on obtient en ajoutant les 200 lances amenés par Jeanne aux 1572 combattants totalisés plus haut.


Le corps au devant duquel Jeanne d’Arc se porte avec 500 hommes, le 4 mai, au matin, est composé « du bastard d’Orléans, du maréchal de Rays, du maréchal de Saincte-Sévère, du baron de Coulonces, et de plusieurs autres chevaliers et escuiers, avecques autres gens de guerres habillez ge guisarmes et maillez de plomb qui amenoient vivre que ceulx de Bourges, Angers, Tours, Blois envoyoient à ceulx d’Orléans » C’est donc une colonne de ravitaillement. Mais la qualité de ceux qui la commandent indique qu’elle a dût être numériquement forte. C’est ce qui ressort, d’ailleurs, d’un chapitre du compte. Par lettres données à Chinon le 27 avril, Charles VII avait ordonné au trésorier des guerres de bailler « pour deffrayer eulx et les gens de leur compagnie qu’il leur avoit mandé assembler au plus grant nombre que faire pourroient… en partant de leurs garnisons et venant devers Mgr de Rayz, l’un desdits chiefs… pour l’avi aillement des habitants et autres étant en icelle ville et pour la défense d’elle », la somme de 3430 l. 10 sols tournois. Ces capitaines sont Gilles, seigneur de Raiz, Gaultier de Brusac, Achades de la Tour, Jehan Fouquant, Ambroise de Loré, Thudual le Bourgois, Bertrand de la Ferrière, le Bâtard de Beaumanoir, enfin un archer, Robert Le Fèvre, qui a sous ses ordres 38 autres archers. Le nombre des hommes d’armes se monte à 212, celui des archers à 238, soit au total 450 combattants. Et ce total n’est qu’une partie de la colonne de ravitaillement, celle que commande Gilles de Retz. Les forces de la Pucelle sembleraient donc avoir été considérablement grossies par cette colonne de ravitaillement. Mais d’autre part, il convient d’observer que les compagnies de Sainte-Sévère et de Coulonces, entrée à Orléans le matin du 4 mai, prirent part le même jour, l’après-midi, à l’assaut de la bastille de Saint-Pouair ; il convient donc de faire rentrer ce contingent dans le total des 600 combattants qui prirent part à cette action.


Le compte du trésorier pour avril et mai (début), qui renferme les noms de plusieurs nouveaux capitaines ayant amené en ville des secours en nature et en troupes, est d’un faible secours pour contrôler les chiffres du « journal ». Il donne les noms des 29 capitaines – et c’est le nombre le plus élevé- mais, s’il fournit le nombre des hommes d’armes et de trait pour 12 d’entre eux (nombre se montant à 349 hommes d’armes et 589 de trait), pour les 17 autres il se borne à écrire « pour le payement de lui et de ses gens ». Toutefois, si l’on observe que le total des sommes touchées par les capitaines de cette dernière désignation ne se monte qu’à 1879 l.t., soit la moitié environ des sommes touchées par les 12 autres capitaines, laquelle est de 3816 l.t., il faut nécessairement que les effectifs des soudoyers soient augmentés d’environ 50% pour avoir une idée approchée du chiffre total de la garnison d’Orléans au début mai. On arrive ainsi à 534 hommes d’armes et 873 hommes de trait, au total près de 1400 combattants.


La garnison ayant été renforcée, du 24 au 29, par divers contingents, dont le total atteint 650, si on additionne les chiffres du « journal », auquel il faut joindre les 200 lances amenées par Jeanne d’Arc, il faudrait retrancher 850 de 1400, c'est-à-dire estimer la garnison à environ 550 hommes pour la période antérieure au 24 avril. C’est trop peu. Nous avons vu que, à la fin mars, la garnison atteignait au moins le chiffre de 922 combattants, après avoir touché le millier un peu auparavant."
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dim. févr. 25, 2007 8:48 am

Voici un lien qui donne une version de 1866 du journal du siège d'Orléans


http://www.stejeannedarc.net/chroniques ... rleans.php
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lun. mars 05, 2007 9:54 am

Tiré du même livre et du même auteur.


"LA BATAILLE DE ROUVRAY


DITE DESTROUSSE DES HARENGS


(12 FEVRIER 1429)


Au début de février 1429 un renfort en hommes et en provisions de bouche fut envoyé de Paris à l’armée anglaise qui assiégeait Orléans. On était en carême et les 300 chariots et charrettes furent chargés surtout de harengs et autres provisions convenant à cette période de jeûne. Le tout fut mis sous la direction de sir John Fastolf, grand maître de l’Hôtel du Régent, duc de Bedfort.. L’escorte était forte de 1500 combattants, tant Anglais que « faux Français », dont le prévôt de Paris, Simon Morhier. Après un arrêt à Etampes, le convoi de ravitaillement se dirigea sur Rouvray-Saint-Denis, petite place occupée par le forces anglaises, entre Angerville et Janville, à deux lieues environ de cette dernière localité.


Le comte de Clermont, fils du duc de Bourbon, se tenais à Blois essayant de rassembler des forces pour la délivrance d’Orléans. Il eut vent de l’expédition et prévint les capitaines défendant Orléans. Dès le 10 février il fut rejoint à Blois par le Bâtard d’Orléans, qui s’échappa de la ville avec 200 combattants, John Stuart de Darnley, connétable des forces écossaises en France, le baron de la Tour d’Auvergne, le vicomte de Thouars, sire d’Amboise, « accompagniez, comme on disoit, de bien 4000 combattants, tant d’Auvergne, Bourbonnois comme d’Ecosse pour sçavoir d’eulx l’eure et le jour qu’il leur plaireit mectre d’assaillir les angloys et faux François amenans de Paris vivre et artillerie à leurs gens tenans le siège ».


Le lendemain, vendredi 11, quittent aussi d’Orléans, à l’insu des assiégeants, Guillaume d’Albret, William Stuart, frère du connétable John Darnley, Sainte-Sévère, maréchal de France, Xaintrailles et son frère Poton, Etienne Vignolles, dit La Hire, Lescot sire de Verduzan, et autres seigneurs, accompagnés de 1500 combattants, pour rejoindre le comte de Clermont. Celui-ci, le même jour, s’avançait jusqu’à Rouvray-Saint-Denis, au Nord d’Orléans, avec toute sa « compagnie ». « Et quand il furent tous assemblez, ils se trouvèrent de 3 à 4000 combattants ».


Cette dernière estimation est en contradiction avec la précédente. En effet, si l’on additionne l’effectif des corps de Guillaume d’Albret, William Stuart etc., soit 1500 combattants, avec celui, parti la veille, de John Stuart etc., comportant 4000 combattants venus d’Auvergne, de Bourbonnais, d’Ecosse, enfin avec le contingent de La Hire (200 combattants), on arrive à un total de 5700 combattants. Encore faudrait-il admettre que le comte de Clermont était sans forces et n’amenait que sa personne.


Informés qu’ils allaient être attaqués par des forces considérables, les Anglais du corps de ravitaillement de Fastolf, qui jusqu’alors s’avançaient avec insouciance, s’enfermèrent dans un « parc » fait de chariots et de charrettes, résolus à résister jusqu’à la mort, sans espoir d’échapper autrement « considérant leur petit nombre contre la multitude des François ».


Mais le récit du combat démontre qu’une partie seulement des forces Franco-Ecossaises y fut engagée et sans doute la moindre. En effet, il est certain que le gros des compagnies sorties d’Orléans les 10 et 11 février rejoignit le comte de Clermont à Blois, et ne put prendre part à l’affaire. Or La Hire, qui avait projeté d’assaillir le corps de ravitaillement de Fastolf pendant qu’il marchait encore sans inquiétude, détourné de ce projet par des messages réitérés du comte de Clermont demandant, qu’on n’engageât pas sans lui la bataille, dont il voulait avoir l’honneur, ne consentit à entreprendre la lutte que pour se porter au secours de John Stuart, quand celui-ci, aveuglé par sa haine contre les Anglais, les eut attaqué juste au moment où il convenait d’attendre, puisqu’ils étaient retranchés derrière un « parc » inexpugnable. Or l’Ecossais ne disposait que de 400 combattants et La Hire d’autant, soit 800 hommes d’armes. Il faut joindre les archers de La Hire dont les flèches « avoient rebouté les Anglois ». Leur nombre n’est pas indiqué, mais on peut l’estimer sans trop de témérité. Chaque fois ou presque que le compte du trésorier des guerres Hémon Raguier, énumère l’effectif des diverses compagnies tenant garnison à Orléans, les archers sont sensiblement moins nombreux que les hommes d’armes, environ les 2/5 du total. Admettons qu’il fut égal, on aurait 400 archers. Le tout allait donc, au plus, à 1200 combattants. C’est dire que les assaillants du « parc » furent moins nombreux que les assaillis. Alors tout s’explique : les Anglais, se voyant supérieurs en nombre, sortent du par cet tombent sur les Franco-Ecosssais. Comme ceux-ci avaient commis la faute de mettre pied à terre, contrairement à leur première « ordonnance », ils ne purent ni résister ni fuir. D’où le nombre et la qualité des victimes. Trois à quatre cents périrent. Parmi eux, l’auteur responsable du désastre, John Stuart, son frère William, Jean Nailhac, sire de Chateaubrun, viconte de Bridiers, Guillaume d’Albret, sire d’Orval, Jean de Lescot, sire de Verduzan, Louis de Rochechouart, sire de Montpipeau, Jean Chabot, « avec plusieurs autres qui tous estoient de grant noblesse et très renommée vaillance ».


Le comte de Clermont ne prit pas part à l’action. Evidemment, quand il se décida à bouger, il était trop tard, la débâcle était complète. Il réussit seulement à entrer à Orléans « au soir, bien tard », en compagnie du bâtard d’Orléans (qui, blessé au pied, avait échappé à grand peine à la mort), de la Tour d’Auvergne, du vicomte de Thouars, du maréchal de Sainte-Sévère, du sire de Graville, de Poton. La Hire et Jamet de Thilloy rentrèrent les derniers. Ils s’étaient tenus en arrière pour s’opposer à quelque sotie des Anglais enfermés dans les bastilles, mais ceux-ci ne se doutèrent de rien, heureusement pour les Français, car autrement la « desconfiture » se fût transformée en un total désastre.


Cette défaite, dûe à un défaut d’ «ordonnance », découragea nombre de capitaines. Six jours après, le 18 février, le comte de Clermont quitta Orléans pour Blois emmenant deux grands prélats fuyards, l’Archevêque de Reims et chancelier Regnault de Chartres, et l’évêque d’Orléans Jean de Saint-Michel, le baron de la Tour d’Auvergne, Louis de Culan, amiral de France, La Hire « et plusieurs chevaliers et escuyers d’Auvergne, de Bourbonnais et d’Ecosse, et bien 2000 combattants », « dont ceulx d’Orléans, les voyans partir, ne furent pas bien contans »."
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lun. mars 05, 2007 9:55 am

Suite


"Si l’on s’en fiait aux estimations numériques du « journal du siège », il devrait rester à Orléans comme garnison la différence entre les 5700 hommes sortis de la ville les 10 et 11 février, diminués de 400, chiffre approché des pertes de Rouvray, et des 2000 hommes retirés de la ville par Clermont le 18, soit 3300 hommes sous les ordres du Bâtard et du maréchal de Sainte-Sévère qui, eux, restèrent dans la place assiégée.


Mais cette effectif serait en contradiction complète avec les données du compte de Raguier pour le mois de mars : la première, antérieure à Pâques, donc au 27, accuse 980 hommes d’armes et de trait, la seconde, après Pâques, donc entre le 27 et le 31 mars, 903 au total.


Le chiffre de 3300 est donc inadmissible. Une, au moins, des supputations du « journal » est exagérée ; c’est certainement, avant tout, celle qui attribue aux forces sorties d’Orléans le 10 février avec John Stuart etc. le chiffre de 4000. D’ailleurs l’auteur ajoute prudemment « comme on disoit » Ce n’est donc qu’une estimation en l’air.


Au reste, le « journal se contredit peu après. Il estime les forces totales sorties d’Orléans les 10 et11 février, et assemblé le 11 au soir autour du comte de Clermont, à 3 ou 4000 combattants. Si nous adoptons le chiffre de 3000 et si nous n’estimons pas exagéré l’effectif de 2000 pour l’armée que Clermont retire d’Orléans le 18, il restera environ un millier d’hommes pour constituer la défense de la ville. Ce chiffre coïncidera alors, ou à fort peu de chose près, avec le compte de Raguier.


On vient de voir que les forces réellement engagées à Rouvray ne dépassèrent pas, du coté Français, 1200 hommes. On peut donc estimer que le comte de Clermont garda par devers lui environ 1800 hommes. C’est à ce nombre, tout au plus (car il faudrait déduire les morts), qu’il faut estimer les forces qu’il emmena d’Orléans le 18 février.


Maintenant essayons de nous rendre compte de l’effectif de la garnison d’Orléans, antérieurement à la bataille de Rouvray. Rappelons que, en janvier, le total montait à 800 combattants.


Dès la fin du même mois le roi fait verser pour secourir Orléans des sommes à des capitaines écossais et autres. Une somme importante (3750 l.t.) est baillée à Chinon, le 4 février, à 4 capitaines pour lever des hommes d’armes et de trait au plus vite et en aussi grand nombre que faire se pourra pour secourir Orléans.


D’autre part le « journal du siège » note l’entrée en ville, le 5 février, de 30 combattants venant de la Sologne ; le 8, d’Ecossais sous la conduite de Guillaume Stewart (William Stuart), frère du connétable, avec le sire de Gaucourt, et le sire de Verduzan (Jean Lescot). Le tout fait 1000 combattants « bien habilliez pourle faict de guerre ». a même nuit pénètrent 200 hommes sous Guillaume de Bret et les 120 hommes de La Hire. L’ensemble de ces nouveaux venus se monte donc, si l’on en croit le « journal », à 1350 hommes, ce qui joint à l’effectif de la garnison (800) donnait 2150 combattants.


Ils est donc impossible que, le 10 février, le Bâtard d’Orléans, avec 200 hommes, John Stuart, La Tour d’Auvergne et le vicomte de Thouars s’échappant d’Orléans, aient amené 4000 combattants au comte de Clermont à Blois. Impossible également que, le 11 février, Guillaume d’Albret, William Stuart, le maréchal de Sainte-Sévère, Xaintraille et Poton, son frère, La Hire, le sire de Verduzan, etc.., aient encore amener 1500 combattants au comte de Clermont. Même si l’on réduit le chiffre de 5700 qu’auraient procuré à ce dernier les seuls effectifs venus d’Orléans, qui eut été entièrement vidé de sa garnison, à 3000 ou 4000, comme le porte le « journal », se contredisant, il y a une disproportion inadmissible entre les supputations qu’on tire du « journal » et ce qui ressort du compte du trésorier des guerres Raguier.


Il faut chercher une explication.


Parmi les capitaines nommés à l’occasion de la bataille de Rouvray il en est un certain nombre dont les noms ne se trouvent pas dans la liste de Janvier offerte par le compte de Raguier. Tels sont : le connétable John Stuart (Jehan Stewart), Guillaume d’Albret,sire d’Orval, Jean de Nailhac, sire de Chateaubrun, Jamet de Thilloy, Louis de Rochechouart, sire de Montpipeau, Jean Chabot, Saulton (de Mercadieu), Canede. Les compagnies de ces capitaines, n’ayant pas tenu garnison à Orléans ou n’ayant fait que traverser la ville du 9 au 11 février, ne peuvent représenter que les contingents levés par le comte de Clermont. Et la chose est d’autant plus sûre que ce personnage, étant fils du duc de Bourbon, et La Tour étant baron d’Auvergne, on s’explique que le « journal », à deux reprises, fasse connaître que les soudoyers qui sortent d’Orléans, le jeudi 10 février, pour rejoindre Clermont à Blois, soient « combattants tant d’Auvergne, Bourbonnois comme d’Ecosse ». Après la bataille, Clermont, réfugié à Orléans, en part le 18 février, emmenant « plusieurs chevaliers et escuyers d’Auvergne, de Bourbonnoys et d’Ecosse, et bien deux mil combattans » et retourne à Blois. Le contingent du comte de Clermont n’a donc fait que traverser Orléans. Le « journal » qui note leur sortie, a négligé de noter leur arrivée.


Les Ecossais n’ont pas séjourné, eux non plus, à Orléans, en dehors de la compagnie de William Stuart. Le connétable John Stuart n’a fait que passer avec ses hommes dont l’effectif n’est pas connu.


On est amené alors à considérer le corps qui quitte Orléans en dernier, le vendredi 11 février, dans le but de rejoindre Clermont, composé, outre William Stuart, du maréchal de Sainte-Sévère, du sire de Graville, de Xaintraille, de Poton, de La Hire, du sire de Verduzan « et plusieurs autre chevaliers et escuyers, accompagniez de quinze cens combattans » comme représentant tout ou en partie de la garnison d’Orléans.


Mais celle-ci, en janvier, comptait 800 hommes. Pour atteibdre ce chiffre de 1500 il faudrait qu’elle eût été augmentée de 700 hommes. OR si l’on totalise les renseignement du « journal », on trouve beaucoup plus : 1350 combattants entrés du 5 au 8 février.


Seulement, sur ce total, 1000 sont amenés par William Stuart, Gaucourt et Verduzan. Ces deux derniers ne figurent parmi les capitaines de la garnison que de temps à autre et le premier entré le 8 février part le 11. Ces 1000 combattants n’entre donc à Orléans, le 8, que pour y faire halte en attendant de rejoindre Clermont à Blois. Peut-être en va-t-il de même des 200 hommes de « messire Guillaume le Bret », dont le nom ne figure jamais dans l’effectif de la garnison. Finalement les renforts réels pour la garnison se réduisent aux 30 gens venus de Sologne « qui estoient au mareschal de Sainte-Sévère » et aux 120 « estans à La Hire ».


Finalement on est amené à considérer les 1500 hommes sortis d’Orléans le 11 février, comme formés, eux aussi, sinon en totalité, du moins en bonne partie, de contingents levés pour rejoindre le comte de Clermont, non pour renforcer la garnison d’Orléans.


Un passage d’un mandat de paiement délivré à John Stuart à Chinon, le 30 janvier, va nous éclairer. Ordre est donné de verser une somme importante (3900 l.t.) « à messire Jehan Stewart, chevalier, seigneur de Derule (lire Dernle, c. à d. Darnley), connétable de l’armée d’Escosse, … tant sur le payement de l’estat de sa personne que des gaiges de lui et des autres capitaines et gens d’armes et de traict de sa charge et compagnie, que ledit seigneur lui avoit ordonné mander et assembler à toute haste et diligence pour faire tirer entre le rivière de Loire et eulx joindre avec les autres chiefs et capitaines de sa guerre à certaine entreprise par eulx advisée estre mise à execution à l’encontre de ces anciens ennemis et adversaires d’Angleterre estans lors devant sa ville d’Orléans ».


Cette certaine entreprise ne peut être que l’organisation de ravitaillement de l’armée anglaise assiégeant Orléans par John Fastolf. Charles VII dut en être avisé en janvier. Il prit des mesures en conséquence. Il fit lever des troupes. Clermont, La Tour d’Auvergne, John Stuart et autres assemblèrent des gens d’Auvergne, Bourbonnais, Ecosse, qui entrèrent à Orléans le 8 février, en sortirent le 10 et le 11, se firent battre à Rouvray le 12, refluèrent le soir dans la ville et, finalement, la quittèrent le 18 pour gagner Blois."
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