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Vie, coutumes, institutions, pouvoir et organisation de la société au Moyen-Age

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le furet
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jeu. mars 25, 2010 7:11 am

ArweniaH a dit :


Ce que j'apprends sur les autres auteurs ne m'étonne pas. Et je vais te dire, je suis soulagée, de fait, d'avoir retiré les premiers chapitres de mon roman d'un forum. Sans aller jusqu'à la parano, certains m'ont dit de faire très attention à ne pas être plagiée, et du coup, je n'ai pas posté davantage que le 3e chapitre (que j'ai supprimé d'ailleurs, envoyé à la corbeille du forum). L'auteur du Mans est venu à la pêche aux infos il y a combien de temps ?

Je ne connais pas encore son pseudo d'écrivain mais ça fait bien deux mois maintenant qu'il a remis son manuscrit et ça faisait 2 ans qu'il fouinait. Mais bien qu'ayant toutes les clés en main dès le départ, il a encore fait du roman arthurien pur jus.

Au Véme siécle, l'amour courtois et le romantisme n'ont pas encore été inventé. Par contre, c'est une période de brassage culturel exceptionnel. Le castrum de Brest est défendu par des cavaliers romains maures qui vont s'installer dans la région (les mauri osismiaci dont l'emblème est un "ying yang" 400 ans avant son adoption par les Song en Chine. Une hypothèse est que ce sont des manichéens). Le préfet de Rennes règne sur des létes (colons-déportés) germaniques (Francs ? Saxons ?).

Mais, imagines ce que peuvent donner des unions entre Gallo-romains aux femmes soumises et où tout le droit est concentré sur le Pater familias et des peuplades germaniques où les femmes peuvent hériter, ne peuvent être répudiées sans compensation, etc... Tu as aussi, dans les anciennes lois des Bretons d'Armorique, des codes pour s'arranger et mettre fin aux terribles vendettas qui déciment les familles/clans (Kenedl). Dans cet esprit de solder les querelles, ou de s'en prémunir, la seule faute punie de mort est l'adultère en flagrant délit sinon même le meurtre est puni par une compensation à la famille de la victime et encore si tu réunis assez de témoins prêts à jurer que tu es innocent, tu y échappes.

Ce droit est garanti par un juge coutumier, le machtiern. Mais les anciens fonctionnaires romains sont toujours là et tu auras peut-être à plaider ta cause devant un tribunarius dans une ou plusieurs basilica (cités administratives) ou à payer une amende au fiscarius.

-Donc, la guerre et la justice ce ne sont pas celles des chevaliers même si un observateur fin notera que le féodalisme se met doucement en place à ce moment là.

-L'art d'aimer, c'est Ovide et pas la parabole gay de l'amour courtois du XIIIéme. Il y a deux façades de l'amour, l'aspect abrupt du Pater familias qui règne sur la famille, soumet les femmes de la maison à sa volonté, les cloître à la gréco-romaine et tout ça pour garder la face. Eventuellement, s'il est complétement gay, il va même "s'arranger" avec sa femme pour avoir des héritiers voire en adopter. Et puis tu as l'aspect du mec avec ses sentiments, son amour pour une femme qui n'est pas forcément la matrone qu'on lui a mis entre les pattes via mariage et cet amour ne peut s'exprimer que dans la stricte intimité. En réaction, le christianisme offre un vrai rôle aux femmes (à l'époque) qui vont largement le promouvoir - séduites par les avantages de la morale chrétienne de l'époque semble t-il - et il est vrai qu'on a des monastères mixtes et des "servantes de messe" encore à cette époque.

-La vie de château, c'est dans des halls en bois aux toits de chaumes avec un fossé et une palissade de bois voire éperon barré ou un hillfort en Bretagne (insulaire) ou un crannog en Irlande. Les villes sont désertées en partie mais des familles sénatoriales gallo-romaines persistent à y vivre.

-La nourriture c'est plutôt celle d'Apicius en réservant les produits méditerranéens à l'élite etc... Vive la cuisine au garum ! Image

-Les voyages aussi c'est spécial. Il faut 7 jours de cheval pour joindre Vannes et Paris au minimum (par les voies romaines encore en état et à la belle saison). Mais c'est sans compter les règles légales d'hospitalité des Francs qui peuvent te rallonger le voyage assez considérablement. En revanche la côte de Bretagne insulaire n'est qu'à 24H de Bateau d'Alet.

-L'argent c'est devenu hyper rare, les échanges se font donc beaucoup avec du troc et l'unité monétaire pour évaluer la valeur est : l'esclave mâle ou femelle (servus et ancilla sensiblement le prix d'un cheval). Effectivement, les poules ce sont des "pièces jaunes" :D

Bref, tu es dans un monde à la mad Max. L'ancien ordre garantissant la civilisation a disparu à petit feu mis à part quelques notables qui s'y raccrochent et profitent de la nostalgie ou de la fierté à être romain pour prolonger le mythe. Après la chute de Rome en 476, les Bretons sont les derniers citoyens romains libres de domination barbare et ils en sont conscients. Les villes, trop chères à entretenir, sont en partie désertées. Les anciens esclaves/peuples soumis se réveillent et prennent lentement mais brutalement le pouvoir bien que les traces d'un long melting pot soient tout de même réelles.

Des bandes de brigands composées d'anciens soldats, de gardes de grands domaines et de chefs locaux écument la campagne et se proclament rois. Mais un seigneur de la guerre reste un seigneur de la guerre, jaloux du pouvoir des voisins, méfiant envers sa famille et ses héritiers. Alors, ce sont les crimes dynastiques qui se multiplient - meurtres et incestes à la belle-soeur -. Ce sont aussi les voisins qui trinquent dans des expéditions de pillage pour lesquelles les Bretons sont passés maîtres sur le continent. Malheureusement on est toujours le voisin de quelqu'un...Même les rois Francs n'arrivent pas à réduire des Bretons qui resteront indépendants pendant plus de 900 ans.

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Grég le furet


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arweniah_

jeu. mars 25, 2010 7:55 am

Le furet a dit :


Je ne connais pas encore son pseudo d'écrivain mais ça fait bien deux mois maintenant qu'il a remis son manuscrit et ça faisait 2 ans qu'il fouinait. Mais bien qu'ayant toutes les clés en main dès le départ, il a encore fait du roman arthurien pur jus.
Tu l'as lu ?
Au Véme siécle, l'amour courtois et le romantisme n'ont pas encore été inventé.
Oui, je sais... Peut-on penser quand même qu'un roi puisse être doué d'un certain savoir vivre ? Ou alors c'est lui qui donne l'exemple du goujat ?

Dans cet esprit de solder les querelles, ou de s'en prémunir, la seule faute punie de mort est l'adultère en flagrant délit
Là tu réponds à une autre des questions que je me posais. Et ça tombe bien, parce que je ne savais pas si j'allais punir les personnages coupables, de mort ou les emmurer vivants. Remarque, tu me diras, ça conduit à la même finalité.
Par quel supplice mettait-on les gens à mort à l'époque ?
Je sais qu'il y en avait pas mal, mais pour punir un seigneur ou une dame de haute lignée, lequel était approprié ?
Et le bannissement était réservé à quels actes ?


Pour tout le reste, je te remercie car tu as fait une super synthèse. xD J'en connaissais déjà pas mal (je ne suis pas si inculte que ça, finalement...). J'ai un bouquin sur la nourriture de l'époque, d'ailleurs.
Quant aux château en bois, hélas, je l'ai appris aussi il y a peu et je n'ai pas encore modifié mes constructions en pierre pour du bon vieux bois... Ah là là.
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Hermelind
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jeu. mars 25, 2010 8:42 am

Le furet a dit :

C'est à dire ? Astier a fait une grosse pantalonade sur la période, mais à travers ses allusions, on voit que c'est un fin connaisseur de la période en réalité, pas dupe pour un sou.

A+
Je sais... Les bonus sont là pour rectifier la "réalité" histo, par rapport à ce que lui en a fait :)

Bon, moi, j'avais surtout causé XIXème...
Lady Palace Canada Dry.
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Rhum ! Rhum ! Rhum !
ENLUMINURE ! PAS ICONO ! SCROGNEUGNEU !
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La Prez a TOUJOURS raison !

CQHB !!!
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le furet
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jeu. mars 25, 2010 8:48 am

ArweniaH a dit :
Tu l'as lu ?
Disons que j'ai eu quelques échos oui. Les auteurs étant souvent moyennement paranos, je ne t'en dirais pas plus. Letavia a été consulté via son président surtout. Maintenant c'est l'éditeur que ça regarde mais je ne me fais aucune illusion.

Oui, je sais... Peut-on penser quand même qu'un roi puisse être doué d'un certain savoir vivre ? Ou alors c'est lui qui donne l'exemple du goujat ?
Garde à l'esprit qu'un roi c'est un seigneur de guerre, lettré mais pas obligatoirement. Il peut être le fils brillant d'une lignée de sénateurs ou de nobles romains instruits par un précepteur (qui peut-être un esclave spécialisé à haute valeur ajoutée) Grec ou des moines irlandais rigoureux. Il peut aussi être un novice ou un moine défroqué dès que le trône est vacant, on en connais quelques uns. Mais ce peut-être aussi juste un "bucelaire" d'origine modeste qui s'est taillé une principauté. Illettré, charismatique, intelligent et/ou brutal, etc.

L'étiquette risque fort de ne pas être celle que tu crois dans les deux cas sauf peut-être avec un descendant de famille aristocratique romaine et très conservateur peut-être.

On va dire qu'en public aucune femme ne contredira son mari ou ne ramènera sa fraise sans un statut de supériorité officiel. Après, l'intime, c'est l'intime il n'y a, en principe (souhaitons-le), pas de témoin de ce qui s'y passe ou s'y dit (Voir le duo Clovis-Clothilde mieux documenté). Ceci dit, il n'empêche que les femmes de pouvoir ça existe aussi et pas toujours à travers des amants-hommes de paille comme le gros cliché habituel juste pour placer une scéne érotique dans les oeuvres. Les reines Franques, Théodora (qui passe de prost... heu ! danseuse du port à impératrice byzantine), etc. sont là pour le prouver.

Maintenant, être un mufle brutal ne signifie pas que l'épouse est une aristocrate fine et soignée. Elle peut aussi être elle-même une gourde provinciale stupide refilée avec sa dot après un mariage arrangé.

Là tu réponds à une autre des questions que je me posais. Et ça tombe bien, parce que je ne savais pas si j'allais punir les personnages coupables, de mort ou les emmurer vivants. Remarque, tu me diras, ça conduit à la même finalité.
Par quel supplice mettait-on les gens à mort à l'époque ?
Je sais qu'il y en avait pas mal, mais pour punir un seigneur ou une dame de haute lignée, lequel était approprié ?
Et le bannissement était réservé à quels actes ?


Pour tout le reste, je te remercie car tu as fait une super synthèse. xD J'en connaissais déjà pas mal (je ne suis pas si inculte que ça, finalement...). J'ai un bouquin sur la nourriture de l'époque, d'ailleurs.
Quant aux château en bois, hélas, je l'ai appris aussi il y a peu et je n'ai pas encore modifié mes constructions en pierre pour du bon vieux bois... Ah là là.
Pas de modus operandi de l'éxécution mentionné dans les lois. Légaliser le meurtre (sur coups de sang, s'il décide de faire appel à des témoins, le couple doit être rmis au juge) d'un couple adultérin en flag' c'est aussi absoudre le crime passionnel en fait et solder pragmatiquement les querelles patrimoniales qui découleraient d'une répudiation.
Ceci dit, si tu ne peux pas payer la compensation pour un meurtre, tu es remis à la famille de la victime et ils font de toi ce que bon leur semble (je te laisse imaginer). Sinon on vend tes bien, ta famille et toi-même.

Les lois germaniques ont un côté plus subtil parfois avec le bannissement. Tu es condamné à quitter le pays en chemise en gros à moins que tu aies négocié de pouvoir emporter des possessions ou une suite. En gros, on te condamne à crever de faim dans la forêt à la merci des prédateurs dont les chasseurs d'esclaves sans te condamner formellement à mort. Subtils les barbares !

Enfin Bref, il faut garder à l'esprit qu'une vie humaine c'est de la force de travail donc on préférera te réduire en esclavage que te liquider chaque fois que c'est possible. Si tu es lettré ça ira, si tu ne sais rien faire, tu vas dans les mines ou épierrer les champs...

Sinon, un bon coups de spatha à travers la gorge c'est probable, la crucifixion c'est encore un châtiment infamant sans doute encore pratiqué puisque les chrétiens rechignent à prendre la croix pour emblème avant le courant VIéme-VIIéme siècle selon les endroits. Après, la pendaison (goths) ou la décapitation semblent pratiquées chez les barbares.

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Grég le furet


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arweniah_

jeu. mars 25, 2010 9:49 am

Ok, ok, très bien tout ça... Merci beaucoup...

J'avais plein d'idées de châtiments : genre emmurer ou enterrer la femme vivante. Ça me paraissait bien barbare tout ça. Maintenant, s'ils n'avaient que des châteaux en bois, je les vois mal construire une tour juste pour une bonne femme.
Le bannissement, je prends pour l'homme.
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le furet
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jeu. mars 25, 2010 11:43 am

Pour un emmurement, je te recommande de t'intéresser à Erszebeth Bathory, dite la "comtesse de sang", mais c'est XVIéme siècle... :D

Au Véme siècle par contre, on voit apparaître quelques mystiques chrétiens ascétiques qui s'infligent des souffrances délirantes pour gagner leur paradis. Si ton perso fait une crise mystique, il peut très bien s'infliger des châtiments "débiles" tout seul pour mortifier son corps et expier ses fautes. Nul besoin de l'aide/jugement de la société pour ça, une bonne crise de foi suffit. Sur l'île des moines au large de Perros Guirec, il a fallu l'intervention du pape pour arrêter l'hécatombe de moines/ascètes qui mourraient en traversant ou en tentant de survivre sur cette île battue par les vents sans eau ni bois, à bouffer du cormoran cru... :D

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Morcant
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ven. mars 26, 2010 8:34 am

Par contre, c'est une période de brassage culturel exceptionnel. Le castrum de Brest est défendu par des cavaliers romains maures qui vont s'installer dans la région (les mauri osismiaci dont l'emblème est un "ying yang" 400 ans avant son adoption par les Song en Chine. Une hypothèse est que ce sont des manichéens).
Pas forcément des cavaliers ;)
Et sur leur épisème il a aussi été proposé une origine celtique. On se met tout de suite en tête l'analogie avec le Yin Yang mais leur emblème est proche de certains motifs laténiens. C'est du coup moins exotique, il est possible que leur nom ethnique traduise une réalité ancienne et que leur recrutement soit surtout local chez les Osismes au IVe siècle.

L'époque est chaotique mais pas forcément beaucoup plus que le XIe siècle. Les roitelets brittoniques du VIe siècle n'ont finalement rien à envier aux seigneurs féodaux. Dans les régions les moins romanisées ce sont quand même très souvent des dynastes, et pas des parvenus. Ailleurs certains sont issus de l'aristocratie romaine, des postes dans l'armée ou chez les fonctionnaires.

Dans les sociétés celtiques et germaniques, la famille ou le "clan" (la famille élargie, par exemple tous les descendants d'un même grand-père ou arrière-grand-père chez les Irlandais) a une place bien plus importante que l'individu. Une terre, un troupeau appartient à la famille. Si un homme commet une faute, c'est tout son clan qui paiera compensation et il en risque l'exclusion, devant pariah ou esclave. Je crois qu'on a un bel exemple dans la Vie de Saint Columba, un Irlandais en tuant un autre et sa famille n'acceptant pas de payer pour ses torts, il devient le serviteur de la famille de sa victime.
Comme le dit Bran les compensations sont au coeur du système judiciaire, au moins chez les Bretons et Irlandais. L'unité de mesure est souvent la cumal (en gaélique) ou ancilla, la femme esclave, ou le servus, l'homme esclave. En réalité on paye aussi souvent en bétail ou en lingots de métal. Les monnaies romaines sont rares, les souverains wisigoths et francs vont frapper monnaie mais il me semble davantage à partir du VIe siècle.

Quant à White Horse (l'écrivrain du Mans), il ne s'est jamais caché de ses recherches et c'est un ami. Je l'ai pas mal aidé et je pense qu'il a réussi à produire un univers réaliste, peut être plus encore que celui proposé par Cornwell qui était très (trop) "Dark Ages". Ce n'est pas le seul à avoir vraiment produit un bon récit arthurien historique, il a été notamment précédé par Rosemary Sutcliffe (The Sword at Sunset).


Les forteresses : bois, pierres sèches, talus et fossés défensifs surtout avec parfois plusieurs lignes de remparts. Les forteresses romaines sont toujours utilisées. Pour les autres ont est assez proches dans la conception des forteresses protohistoriques, gauloises ou autres, mais généralement de plus petite superficie. Le hillfort des V-VIe siècles abrite le plus souvent le prince local, sa famille, ses guerriers et ses protégés (bardes, artisans...) ; pas un peuple entier comme l'oppidum gaulois.
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kalima
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ven. mars 26, 2010 8:59 am

"L'unité de mesure est souvent la cumal (en gaélique) ou ancilla, la femme esclave, ou le servus, l'homme esclave"
La cumal, en Irlande, c'est la valeur d'une vache laitière, si ma mémoire ne me fait pas défaut. C'est une somme importante donc et le "prix de l'honneur" (la compensation) dépendait du statut de la personne lésée (y compris dans son honneur, pas forcément dans sa personne ou ses biens).
Joieuse Aguille
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le furet
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ven. mars 26, 2010 10:05 am

Kalima a dit : "L'unité de mesure est souvent la cumal (en gaélique) ou ancilla, la femme esclave, ou le servus, l'homme esclave"
La cumal, en Irlande, c'est la valeur d'une vache laitière, si ma mémoire ne me fait pas défaut. C'est une somme importante donc et le "prix de l'honneur" (la compensation) dépendait du statut de la personne lésée (y compris dans son honneur, pas forcément dans sa personne ou ses biens).
Simple unité monétaire qui est aussi une unité de main-d'oeuvre quelquepart. Mais donc on peut supposer qu'il a pu y avoir un cours de l'esclave variable, une sorte de "protobourse". Selon la stabilité ou l'instabilité du marché (et la pression des moines), tu peux avoir intérêt à déplacer l'unité monétaire de l'esclave à la vache laitière. Simple hypothèse à confronter à la persistance des édits impériaux sur les prix (et en Irlande on doit s'en foutre un peu).

Les lois Bretonnes ou Burgondes, par exemple, fixent des tarifs assez précis. Mais ce sont plutôt les lois germaniques qui différencient le tarif selon si tu es noble, libre, esclave, germain ou gallo-romain, homme ou femme ou enfant. Je te dis ça mais en gardant bien à l'esprit que les anciennes lois Bretonnes que nous connaissons ne concernent que la justice privée (oui le meurtre c'est de la justice privée) alors que la loi Gombette des Burgondes en 503 fait déjà la synthése de la peine privée et publique/régalienne en lui adjoignant une amende à payer au roi.

Côté Breton on ne sais pas trop si ce n'est pas le droit public romain (genre proche de celui du code théodosien) qui continue à s'appliquer ou si chaque tyranneau fait sa loi et rend justice comme il l'entend.

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kalima
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ven. mars 26, 2010 10:19 am

Les lois irlandaises aussi sont très précises sur les compensations qui dépendent du statut, sachant que les femmes aussi peuvent avoir un statut élevée et occuper des places éminentes. Mais bon, on n'est pas là pour parler des Cinq Royaumes.
Joieuse Aguille
arweniah_

ven. mars 26, 2010 12:19 pm

Merci Morcant pour ton intervention pleine de précisions !
Morcant a dit :
Dans les sociétés celtiques et germaniques, la famille ou le "clan" (la famille élargie, par exemple tous les descendants d'un même grand-père ou arrière-grand-père chez les Irlandais) a une place bien plus importante que l'individu. Une terre, un troupeau appartient à la famille. Si un homme commet une faute, c'est tout son clan qui paiera compensation et il en risque l'exclusion, devant pariah ou esclave. Je crois qu'on a un bel exemple dans la Vie de Saint Columba, un Irlandais en tuant un autre et sa famille n'acceptant pas de payer pour ses torts, il devient le serviteur de la famille de sa victime.
Comme le dit Bran les compensations sont au coeur du système judiciaire, au moins chez les Bretons et Irlandais. L'unité de mesure est souvent la cumal (en gaélique) ou ancilla, la femme esclave, ou le servus, l'homme esclave. En réalité on paye aussi souvent en bétail ou en lingots de métal. Les monnaies romaines sont rares, les souverains wisigoths et francs vont frapper monnaie mais il me semble davantage à partir du VIe siècle.
Ok, c'est donc la bonne option que j'ai choisie. La femme adultère va échapper de peu à la vengeance de son mari, et celui-ci va exiger une compensation très élevée.
Peut-il exiger des terres ET des esclaves ? Et renvoyer la femme dans sa famille qui ensuite, fera d'elle ce que bon lui semble ?
Peut-il aussi demander une certaine somme en pièces d'or ? Et quel montant peut-il demander en ce qui concerne une femme noble ?
Quant à White Horse (l'écrivrain du Mans), il ne s'est jamais caché de ses recherches et c'est un ami. Je l'ai pas mal aidé et je pense qu'il a réussi à produire un univers réaliste, peut être plus encore que celui proposé par Cornwell qui était très (trop) "Dark Ages". Ce n'est pas le seul à avoir vraiment produit un bon récit arthurien historique, il a été notamment précédé par Rosemary Sutcliffe (The Sword at Sunset).
Si tu l'as bien aidé, tu dois avoir une idée de son histoire... Puis-je t'en demander le thème ? Pas me la raconter, mais peux-tu juste me préciser où il situe son texte et quels sont ses principaux personnages, la trame de son histoire ?
Je ne veux pas le plagier : si son manuscrit a déjà été accepté par un éditeur, ce serait idiot de ma part, d'autant que mon roman est terminé. Mais je voudrais juste savoir si, au moins, mon histoire ne ressemble pas à la sienne, sinon, je n'aurai aucune chance d'intéresser un éditeur.

Les forteresses : bois, pierres sèches, talus et fossés défensifs surtout avec parfois plusieurs lignes de remparts. Les forteresses romaines sont toujours utilisées.
Peut-on ainsi envisager une forteresse composée de bâtiments principaux en pierre, et avec, autour, des ajouts de bâtisses en bois ? Est-ce crédible ?
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le furet
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ven. mars 26, 2010 1:06 pm

ArweniaH a dit :
Peut-il aussi demander une certaine somme en pièces d'or ?
Je sais que c'est moins glamour mais ce sera plutôt en lingots d'étain, en céramiques byzantines, en vin de méditerrannée voire en soie. Pour de grands dignitaires, un plat d'argent, un bijou en or sont envisageables. Pour faire l'appoint, penses te faire aider d'esclaves, les porcelets sont une petite monnaie prompte à courir partout.

:D
Grég le furet


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Morcant
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ven. mars 26, 2010 1:27 pm

Peut-il exiger des terres ET des esclaves ? Et renvoyer la femme dans sa famille qui ensuite, fera d'elle ce que bon lui semble ?
Peut-il aussi demander une certaine somme en pièces d'or ? Et quel montant peut-il demander en ce qui concerne une femme noble ?
Ca dépend du peuple. Ce sont des Bretons ? De toute façon ce ne sera pas tant à lui d'exiger la compensation, que au "juge", le machtiern chez les Bretons, de fixer le montant. Je pense que le coupable et sa famille s'acquittent comme ils le peuvent de la compensation, en fonction des équivalences entre esclaves, métaux ou autres objets. Le bétail (surtout les bovins) est assez incontournable et intervenait sans doute dans la majorité des transactions. On pourrait rajouter des produits exotiques comme du vin ou de l'huile, de la vaisselle orientale en céramique, importés par les Bretons insulaires à l'époque.
Oublie les espèces monétaires. Si elles interviennent dans la compensation, c'est seulement parce que la famille de l'accusé en dispose comme bien patrimonial par exemple.

Quant aux terres, il est intéressant de noter que pour le cas du servus ce n'est pas toujours clair. L'esclave peut être parfois lié à la terre, auquel cas on donne une terre avec le "serf" qui la cultive.

Pour les anciennes lois bretonnes, va voir par ici :
http://schnucks0.free.fr/forum/viewtopic.php?f=39&t=388

Et plus précisément celles ci :
Loi A17 : mort pour celui qui fornique avec la femme, la sœur ou la fille d'un autre. Celui qui le tue n'a pas à payer de compensation.

Loi A23 : un homme jugé pour fornication doit jurer dans trois provinces ou payer une serve.

Loi P16 : un homme jugé pour fornication doit jurer avec sa parenté dans trois basiliques, ou payer une serve.
Ces lois semblent se contredirent. Il est possible que la législation n'est pas toujours été la même. A toi de voir la version que tu préfères, ou adapter les choses.
Pour la petite histoire une des lois vise le contrat de concubinage, que l'église appréciait moyennement mais pourtant toujours bien vivace en Bretagne au IXe siècle. Un homme avait ainsi tout à fait le droit de prendre une concubine en plus de sa femme légitime, les enfants issus de cette union étant aussi légitimes.

Pour la répudiation ou le divorce, je sais qu'en Irlande ça se faisait pour ce genre de raison. D'ailleurs la femme pouvait demander le divorce si son mari fornicait les épouses des autres, s'il avait des penchants homosexuels ou si il était impuissant (avec examen par un jury féminin pour vérifier les dires à la clé).
Si tu l'as bien aidé, tu dois avoir une idée de son histoire... Puis-je t'en demander le thème ?
Il raconte l'histoire d'Arthur, de son enfance à sa mort.
Si tu veux le contacter voilà son blog : http://white-horse-540.oldiblog.com/
Peut-on ainsi envisager une forteresse composée de bâtiments principaux en pierre, et avec, autour, des ajouts de bâtisses en bois ? Est-ce crédible ?
On a plusieurs exemples de bâtiments romains réutilisés dans d'anciennes villes ou forts, même si souvent on change les matériaux. Ainsi dans le fort de Birdoswald sur le mur d'Hadrien, un grand hall fut construit à la place du grenier romain. A Cirencester (ou une autre ville, j'ai un doute) il me semble que l'amphithéâtre fut fortifié et devint la zone d'habitat principale. Ce sont surtout les fortifications romaines qui sont réutilisées. Les autres bâtiments romains (pour les Bretons) sont parfois occupés provisoirement puis abandonnés au profit de nouvelles constructions plus adaptées aux besoins de la population.
Quant on utilise la pierre, il s'agit un général de "pierre sèche" c'est-à-dire non maçonnée, pour des murs assez bas en alternative de planches ou de claies de branches recouvertes de torchis. Et pour les remparts, on a parfois une façade de pierre sèche (ou de planches), avec des poteaux formant l'armature (le principe du murus gallicus) et une plateforme de combat au sommet avec des planches ou des claies. Le rempart est comblé avec des gravats (terre ou pierre) et souvent sur un talus ou une butte naturelle.

Par exemple :
http://www.celticworld.it/immagini/wiki/fg_44_36.jpg
http://upload.wikimedia.org/wikipedia/d ... icus_2.jpg
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le furet
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ven. mars 26, 2010 2:25 pm

Morcant a dit :
Ces lois semblent se contredirent. Il est possible que la législation n'est pas toujours été la même. A toi de voir la version que tu préfères, ou adapter les choses.
Pour la petite histoire une des lois vise le contrat de concubinage, que l'église appréciait moyennement mais pourtant toujours bien vivace en Bretagne au IXe siècle. Un homme avait ainsi tout à fait le droit de prendre une concubine en plus de sa femme légitime, les enfants issus de cette union étant aussi légitimes.

Pour la répudiation ou le divorce, je sais qu'en Irlande ça se faisait pour ce genre de raison. D'ailleurs la femme pouvait demander le divorce si son mari fornicait les épouses des autres, s'il avait des penchants homosexuels ou si il était impuissant (avec examen par un jury féminin pour vérifier les dires à la clé).

Ca c'est un truc génial, c'est le CDD de mariage pour un an reconductible :D . Les prêtres chrétiens détestaient ça mais la tradition était si forte qu'elle dure encore quelques siécle.

Sinon, Morcant t'a donné les motifs de divorces Irlandais, d'autres lois germaniques te précisent que tu ne peux répudier ta femme que pour "sorcellerie" (littéralement empoisonnement), infertilité et adultère. Sinon, l'homme est libre de la quitter à tout moment à condition de tout lui laisser.

Dans les lois Bretonnes il y en a une qui interdit d'épouser son esclave sans quoi l'esclave est placé sous la protection du prêtre et le fautif vendu comme esclave. Sans doute que l'affranchissement donnait lieu à une taxe et qu'on ne rigolait pas avec les contrevenants...

A+
Grég le furet


56


Miles britto-romain an 5OO.


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arweniah_

ven. mars 26, 2010 4:55 pm

J'étudierai tous ces liens demain. Merci beaucoup, ça va m'être super utile.

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